
Rugby et Citoyenneté : la Guyane au cœur du jeu
Au-delà des lignes de touche et des essais, le rugby en Guyane raconte une histoire d’engagement et de solidarité. Sur ce territoire d’Amazonie française, où les villages sont parfois séparés par des heures de pirogue, comme celui des Trois Sauts, la Ligue de Guyane de Rugby s’est donnée une mission : faire du ballon ovale un lien entre les jeunes, leur culture et leur avenir. Entre sport, citoyenneté et inclusion, cette aventure collective transforme le quotidien de dizaines de jeunes amérindiens, tout en affirmant les valeurs universelles du rugby.
Comme l’explique Steve Yarde, président de la Ligue Guyane de rugby, cette initiative est à la fois sportive, citoyenne et sociale. « C’est au-delà du simple fait de faire connaître notre pratique commune. Il y a la volonté de créer du lien, de la fierté et de l’appartenance. » Menée pour la quatrième fois cette année, l’opération vise à reconnecter de jeunes licenciés à leurs villages d’origine. Beaucoup d’entre eux, internes toute l’année, ne rentrent que rarement chez eux. Grâce au rugby, ils renouent avec leurs racines, tout en continuant à pratiquer leur sport favori.
À Saint-Georges, plusieurs jeunes issus de villages isolés participent désormais à des tournois et entraînements réguliers. Pour ces enfants souvent éloignés de leurs familles, le club représente une bouffée d’oxygène. « C’est leur respiration dans une année parfois difficile », confie Steve Yarde.
L’initiative a aussi permis à certaines jeunes filles de vivre des moments inédits : huit joueuses du club ont pris l’avion pour la première fois afin de participer à un tournoi en métropole, foulant la pelouse avant un match de Top 14 à Marseille. Une expérience marquante qui illustre la portée humaine du projet.
Au-delà du jeu, le rugby devient un outil d’expression et de confiance pour des jeunes souvent réservés. « Ce ne sont pas des jeunes qui se livrent facilement. Mais à travers le rugby, ils apprennent à communiquer, à s’ouvrir aux autres », souligne Yarde.
Les jeunes filles amérindiennes, notamment, trouvent dans ce sport un espace d’émancipation. Dans des sociétés matriarcales où elles assument de nombreuses responsabilités, elles se découvrent aussi une force nouvelle dans le collectif et l’engagement. « Les filles adorent le plaquage ! » s’amuse Steve Yarde. « Là où les garçons sont plus dans le toucher, elles s’expriment pleinement dans l’action. »
L’expérience menée sur le territoire de l’Oyapock s’étendra bientôt sur le fleuve Maroni, afin de toucher de nouveaux villages dès septembre prochain. « On veut que ce lien entre sport, éducation et culture continue à grandir, toujours dans cet esprit de partage et d’ouverture. » Portée par la Ligue de Guyane de Rugby, cette initiative illustre à merveille la puissance du sport comme levier social et éducatif. Mais pour que cette dynamique continue à se développer, un enjeu majeur demeure : assurer sa pérennité et renforcer ses moyens.
L’ambition de la Ligue est claire : faire perdurer cette action dans le temps et l’étendre à d’autres territoires guyanais, des rives du Maroni aux zones plus enclavées. Cette expansion nécessite cependant des partenariats solides, tant institutionnels que privés, afin de garantir les moyens logistiques, humains et matériels indispensables à la réussite du projet.
« Nous avons la volonté, l’énergie et les jeunes. Il nous faut maintenant des partenaires à nos côtés pour aller plus loin », résume Steve Yarde. Grâce à ces soutiens, la Ligue espère bâtir un véritable modèle d’inclusion par le sport, capable d’inspirer d’autres territoires ultramarins et de faire rayonner les valeurs du rugby jusque dans les villages les plus isolés de Guyane.








